mardi 16 août 2011

Les basses terres, du nord à Guayaquil

Les basses terres au nord sont humides. Elles abondaient autrefois en forêts tropicales côtières dont il ne reste maintenant que quelques rares fragments, lesquels contiennent encore paraît-il de nombreuses espèces endémiques qui ne se retrouvent nulle part ailleurs. Mais la plupart de ces forêts ont laissés place aux  pâturages ou à diverses cultures, parfois industrielles. Les plantations de palmiers royaux, d'origine africaine, sont notamment nombreuses, ces arbres se distinguant de leur cousins locaux par leur stature plus imposante, alors qu'il jouent les oignons dans leurs rangs. Dès qu'on arrive dans les basses terres (avant même d'atteindre les plages qui comblent le récit que vous réserve Laurie), l'humidité est si prenante qu'on semble la voir à travers les vitres de l'autobus. Un paysage de buttes dégarnies de leurs forêts où ont été replantées les arbres qui conviennent mieux à l'usage de notre espèce. De nombreux urubus (je crois) et autre oiseaux de proies planent au-dessus de ces collines, à l'affût d'un cadavre ou de poubelles dont ils pourraient se régaler. Seulement au-dessus du terminal de la ville d'Esmeraldas où nous avons fait escale, il devait y avoir une centaine de ces oiseaux tournoyant au-dessus de nos têtes, les plus bas à quelques dizaines de mètres, et les plus hauts se distinguant à peine, des petits points noirs dans le gris terne du ciel.

Plus au sud, lorsqu'on quitte Same, le paysage se dégarni un peu plus. Les arbres deviennent plus larges que haut, rappelant un peu ceux qui se retrouvent dans les savanes africaines. Lorsqu'ils ont encore des feuilles, leur vert est terne. Les herbes s'assèchent sur les collines, passant d'un vert jauni au brun clair, se dispersant en touffes entre les buissons et découvrant une terre asséché en plusieurs endroits. Dans les fossés qui séparent les buttes, la végétation reprend un peu de vigueur, s'abreuvant dans les petits ruisseaux qui peuvent y couler. Le climat s'assèche. Vers l'ouest, de nombreux étangs rectangulaires faisant entre 40 et 100 mètres de côté et séparés par des digues végétalisées d'un peu plus d'un mètre de haut sont utilisés pour la creveticulture qui, ici comme ailleurs, a ravagé les mangroves qui autrefois envahissaient la côte.

Notre progression vers le sud nous amène à San Vicente où nous devons prendre un bateau pour traverser le fleuve Chone et arriver à Bahia de Caraquez, de l'autre côté. Cette dernière ville est située sur une petite péninsule qui s'allonge entre l'embouchure du fleuve et l'océan Pacifique. Sans être complètement moderne, tous les bâtiments n'y sont pas automatiquement empreints de décrépitude, ce qui n'est quand même pas si fréquent ici. De grands hôtels luxueux ont poussés tout le long de la côte, au bout de la péninsule, créant une lignée d'édifices blancs relativement modernes. Plusieurs voiliers sont amarrés du côté du fleuve, lequel est encadré d'une plage tranquille et sans vagues et de restaurants sur pilotis. De l'autre côté toutefois, là où le Pacifique frappe la ville, la plage qui est surplombée de quelques rochers et d'un mur de béton est plutôt agitée. De nombreuses vagues écumantes y déferlent continuellement, ne laissant aucune pause aux baigneurs qui s'y aventurent. Le problème de Bahia, du moins pour nous, est que la ville est une destination vacances pour les Équatoriens qui, justement, sont présentement en vacances. Et en arrivant là un vendredi, on a trouvé une chambre de justesse, et pour une nuit seulement, suivi du même scénario le lendemain. On a malgré tout pu profiter d'une journée sur place, grimpant quelques centaines de marches pour admirer la ville de haut. Et le soir, par hasard, en errant dans les rues pour retarder le retour à notre deuxième chambre aux allures d'hôpital psychiatrique, nous sommes tombés sur une parade où, outre les majorettes qui se faisaient aller la jupette, de charismatiques danseurs démontraient en couples leurs multiples talents, sur des airs locaux et en costumes colorés inspirés d'habits ruraux.

Le lendemain, soit avant-hier, départ vers Guayaquil. Un paysage toujours un peu asséché au sud de Bahia, au milieu duquel, progressivement, quelques arbres bien particuliers font leur apparition. Leur tronc, recouvert d'une légère mousse, arbore une couleur vert pâle, légèrement bleutée. Un peu tordu, il est fréquemment plus étroit à la base qu'au centre où, à mi-chemin entre la base et la première branche, il bombe légèrement pour retrouver sa circonférence initiale plus haut. Les branches, qui partent dans un peu tous les sens et qui se fractionnent rapidement, n'ont aucune feuille. Les plus beaux ont tout simplement de nombreux gros cocons laineux couleur crème pour compléter leur parure.

Enfin, Guayaquil, le port principal du pays. L'autobus passe tout d'abord dans les coins pauvres. Des taudis en tôle rouillé. Pas d'arbre. On cherche l'ombre, et à part quelques petits palmiers jaunis sur le bord de de la route, il ne semble pas y en avoir. Plus loin, les coins riches, barricadés par d'imposantes clôtures, côtoient l'immense terminal d'autobus. Enfin, un taxi nous mène au centre-ville. Et malgré la mauvaise réputation de la ville, il faut dire qu'elle paraît bien, du moins au centre. Des allées de gratte-ciels bien entretenus (très rares ici, l'ai-je déjà dit?), sans être trop abondants, et plusieurs rues dallées où sont plantés de nombreux arbres pour embellir l'endroit. Quelques coins de verdure, un particulièrement important qui longe le fleuve Guayas où est ancré un pas-vraiment-authentique-mais-c'est-pas-ben-grave bateau de pirate. Au bout de ce parc (le Malecon), au nord, une petite butte aux rues piétonnières en pierre et aux bâtiments surréalistement colorés (couleur banlieue d'Édouard aux mains d'argent) où abondent les vendeurs de boissons et d'autres cossins permet une petite escalade. Au sommet règne un phare d'où peut être admirer la ville dans toutes les directions, des grattes-ciels aux taudis. Dans un autre parc, un carré situé au milieu de la ville et faisant face à une cathédrale, des familles d'iguanes sont entretenus. On ne sait pas pourquoi ni comment ils ont aboutis là, mais ils y sont nourris et y demeurent donc sans stresser en raison des nombreux paparazzis. De toute façon, il n'y aurait nulle part ailleurs où aller. Ils sont tous là, certains faisant plus d'un mètre, étendus dans le gazon, ou pour la plupart dans les branches de deux ou trois arbres sans feuilles (ne pas se tenir en-dessous). Sans avertir, un petit écureuil surgit au-milieu d'eux, attirant tous les regards des gens d'ici. Et dans un étang à côté, un paquet de gros poissons partagent leur eau avec un paquet de grosses tortues, sans doute introduits ici dans leur cas.

Demain, départ pour Cuenca, et pour la suite... On est toujours en vie et en forme, et outre les vestiges de la brûlure de méduse qui décorent mon bras, tout est ok!


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire