dimanche 20 novembre 2011

L'épopée écourtée chez nos voisins du sud

Le roadtrip s'est finalement terminé aussi rapidement qu'il a commencé... c'est qu'il faut être riche pour voyager chez les Étasuniens si on veut en profiter un peu... ce qu'on n'est pas...

Partis le 2 novembre après un dernier petit tour de remorqueuse, on a commencé tout ça en douceur avec deux nuits dans une chambre surpeuplée de meubles quétaines, dans une vieille maison au centre de ce bon vieux village d'Ogunquit. Cela dit, plutôt que d'y croiser des foules québécoises qui n'en finissent plus de défiler sur ce petit bout de côte surexploité, comme on en voit d'habitude en été, le temps était froid, quoique pas trop, les habitants comme les boutiques sommeillaient, et quelques vestiges de bancs de neige jonchaient les coins ombragés. Laurie profite de l'endroit pour manger un homard, et on marche sur les rochers et sur la plage sous un ciel obscurci, alors que le soleil paresseux ose à peine se pointer le nez à ce temps de l'année. Après deux jours, on s'enfonce un peu plus dans les campagnes du Maine, plus au nord, en allant visiter ma sœur et sa superbe famille. Encore quelques jours paresseux à visiter le coin en voiture, à prendre la vie tranquillement, dans un paysage de lacs et de feuilles qui, à l'apogée de leur vie, s'enflamment merveilleusement de couleurs vives. On passe par quelques villages sans prétention aux maisons recouvertes de planches placardées à l'horizontal. On arrête un peu à la ville de Bath située près de la côte et dont le pont surplombe une rivière aux eaux saumâtres qui vont et viennent au gré des marées. On visite la plage du Reid State Park après qu'un cerf immense ait fui devant notre voiture. Bref, on se la coule douce et lentement pendant ces cinq jours. Et on quitte pour Boston le 9 novembre.

Habitués qu'on est de se pointer dans une ville sans réservation en choisissant une direction approximative et en trouvant une chambre à tout coup (c'est comme ça que ça marche dans les pays où on voyage habituellement), on a mis du temps avant de s'établir à Boston. Un bon trois heures de tournage en rond à Charlestown et à Boston nous a mené dans la pire des chambres qu'on ait connues pour ce qui est du rapport qualité/prix. Un trou. Dans une auberge de jeunesse. Manquaient que les attaches de cuir sur le lit pour compléter la superbe ambiance d'asile qui nous grugeait un bon 113$ la nuit. On a vite remédié à la situation le lendemain en cherchant une autre chambre pendant encore beaucoup trop de temps pour se ramasser à Danvers, l'ancien village de Salem (et donc près de la ville de Salem), un gros motel imprégné de l'odeur de cigarette et situé à côté d'une autoroute... mais au moins un brin plus abordable. Sinon, encore un bon quatre jours à visiter le coin, de façon un peu plus active cette fois, et en axant nos visites sur Boston et Salem. Notre première escapade à Boston (celle en voiture) nous avait déjà permis d'apprécier la ville de Charlestown et un peu du centre de Boston, et on en a vu encore plus lors de notre deuxième escapade, celle-ci commencée en train depuis Salem. Et il faut dire qu'à Boston, aucun quartier ne semble avoir été laissé à lui-même. Tout est parfaitement beau, propre et charmant, comme un mauvais décor qui manque de réalisme tant il manque une certaine couche de crasse urbaine. D'imposants immeubles à logements aux façades uniformes et bien détaillées, ou d'énormes maisons en briques rouges qui ne cachent pas leur valeur forment les quartiers résidentiels qu'on retrouve plus au sud ou à l'Ouest du centre. Les rues sont propres et riches, les gens semblent sortir de magasines de mode, et le tout se marie parfaitement à l'enchantement qu'y apporte l'automne. Et plus au centre, entre les vieilles églises et les anciennes tavernes qui ont su garder tout leur charme (dont la plus vieille taverne des É-U qui, mis à part son titre et son allure, aurait bien besoin d'un bon chef et d'une bonne sélection de bières) a poussé un superbe mélange d'édifices qui, s'ils n'imitent pas l'architecture ancienne, possèdent une belle touche de modernisme. Et la ville, qui se traverse facilement à pied dans tous les sens possibles, est complétée par un parc central envahi lui aussi par l'automne, un quartier chinois juste assez sale pour qu'on y reconnaisse la bonne ambiance, et une promenade près de la rivière Charles d'où on peut profiter d'un coucher de soleil. Et voilà tout ce qu'on a fait! Visiter la ville à pieds! Prendre une bière dans une taverne ancestrale, un café pour se réchauffer dans le quartier financier, et découvrir chaque recoin caché de cette incroyable ville.

Entre les visites à Boston, c'est la ville (plutôt un village en fait) de Salem qui a occupé notre temps avec ses histoires de sorcières. Et pour nous mettre dans l'ambiance, alors qu'on apprenait sur la chasse aux sorcières de 1692 et l'hystérie qui s'était emparée du village, on a eu droit à notre première journée grise, alors que le ciel et le vent nous crachaient dessus et nous fouettaient sans ménagement. Brièvement, en 1692, quelques jeunes filles fréquentaient une ancienne esclave mariée à son maître et qui leur racontait des histoires africaines, des histoires de sorcellerie et de vaudou. Et les jeunes filles agissant étrangement dans leur jeux car influencées par les histoires entendues, l'entourage a commencé à s'inquiéter de leur comportement. Si bien que les jeunes filles durent voir un médecin qui, ne pouvant rien trouver pour cause de leur folie, déclara qu'elles étaient possédées, qu'elles avaient été ensorcelées. Il fallait donc trouver un coupable. Et à partir de ce jour, et pour les mois à venir, tous ceux que les jeunes filles désignaient comme sorciers/sorcières devaient être traduits devant la cour. 150 personnes furent enfermées dans des conditions pires que lors du régime des Khmers Rouges au Cambodge (on a réellement pu comparer les deux types de cachot), 19 furent pendues, une écrasée, et on ne sait plus combien exilées. Et les jeunes filles, se réjouissant de l'attention qu'elles s'apportaient, continuaient à accuser qui elles voulaient bien, alors que les hauts placés, se réjouissant tout autant de la situation, pouvaient hériter des terres des condamnés et des exilés. Et grâce à cet épisode de folie, le village peut encore jouir d'une belle petite industrie touristique. Mis à part les musées, des dizaines de magasins d'articles de sorcellerie et de tout ce qui tourne autour (penser à la thématique Halloween) meublent le petit village, très joli et accueillant d'ailleurs. Maisons hantées, diseuses de bonnes aventures, vendeurs de bidules fantastiques ou lugubres, de pierres multiples et de potions aux propriétés thérapeutiques. Notre marche un peu à l'écart de tout ça, sous un ciel gris, dans les rues désertes de Salem où seuls le vent et les carillons se faisaient entendre, a été gâché par le salut beaucoup trop sympathique d'un résident pas evil du tout. Péteur d'ambiance!

En quittant Boston, il a fallu accepter l'inévitable. New York serait notre dernier arrêt. Le pays gruge notre budget à toute vitesse, et pas moyen de l'éviter si on veut dormir dans un lit et manger autre chose que de la bouillie pour les rats. Donc New York, dernier arrêt. Contrairement à Boston, la ville a un air plus authentique: elle est bien sale et correctement crasseuse. Sans doute pas aussi belle, mais Ô combien imposante. Puisque tout le monde l'a vue, inutile de trop décrire j'imagine, mais disons simplement que le quadrillage de gratte-ciels qui n'en finit plus d'un bout à l'autre de la ville a de quoi impressionner. Première journée, visite de Time Square (et pas la dernière), réel abus de stimulus visuels, pervers et perpétuel défilement de publicités de toutes sortes, de toutes couleurs, de toutes saveurs. De toute beauté. Un tour à Central Park, où à notre grande déception, tous les chemins et tous les gazons sont interdits d'accès, nous dirigeant sur un chemin linéaire et sans trop de surprises, l'entretien du parc oblige. La cinquième avenue, populaire pour ses magasins de mode... d'un intérêt aussi prenant qu'un après-midi au carrefour Laval... On passe la soirée dans le plus vieux comedy club de la ville, le Dangerfield's où ont défilés plusieurs comédiens bien connus à Hollywood. Le lendemain, départ vers le sud de Manhattan pour commencer avec une montée au sommet de l'Empire State building. Pendant qu'on est là à regarder les blocs qui s'étendent à perte de vue, quelques gardiens montent pour tasser la foule hors d'un des coins de l'observatoire. Des bannières sont posées, et tout est prêt pour une petite scéance de photographie lorsque Mary Poppins se pointe le nez, celle-là même qui joue sur Broadway, prête à se faire aveugler par des centaines de flashs et à voir des points noirs pour le restant de la journée. Tout le monde la prend en photo, et nous, on prend tout le monde en photo, avec les gardes et tout et tout, pour une belle image bien représentative du pays, nous semble-t-il. À ce moment, un faucon pèlerin qui semble sortir de nulle part vient planer autour de nous, et contrairement au reste de la foule, on oublie la scène obscène devant nous pour regarder danser ce magnifique oiseau. Ensuite, une bouffe viet dans le quartier chinois pour un petit soulagement des burgers et autre gastronomie du genre, un tour sur Wall Street et dans le quartier financier pour zieuter un peu le parc qui, autrefois envahi du 99% de la population, est maintenant gardé par une centaine de policiers bien cordés et prêts à toute éventualité, et un petit tour dans le musée Remembre 9.11 pour s'énerver un peu. Le but initial d'aller là était de se procurer des billets pour visiter Ground Zero, encore barricadé et aux entrées limitées, mais le musée nous a convaincu de filer à l'anglaise. Partout, il est affiché "souvenons-nous à jamais de la brutalité des terroristes, des 3000 innocentes victimes qui ont péri, qu'on est gentils et eux méchants". Oui, vrai, c'est pas une jolie histoire. Mais nulle part parle-t-on de se souvenir de "pourquoi nous ont-ils fait ça, y avons nous même un peu réfléchi, peut-être y a-t-il des conséquences à aller jouer aux rois à l'étranger, à faire des dizaines de milliers d'innocentes victimes, à piller leurs ressources et exploiter leur population, à soutenir des dictateurs tant qu'ils nous laissent l'accès désirer aux richesses qu'on convoite...". Non, rien de tout ça. Que du "on est gentils, ils sont méchants". On est sorti.

Le lendemain, journée pluvieuse, on essaie pour la première fois de comprendre quelque chose dans le métro de New York pour se rendre au sud de Manhattan, prendre un bateau et aller voir de près cette fameuse statue de la liberté. Ça change pas la vie, mais c'est une belle pièce à contempler pour quelques minutes. On essaie de l'imaginer à son état original, tout de cuivre vêtue. Puis, pour finir en beauté, le soir venu, on va voir le fantôme de l'opéra sur Broadway. Et le lendemain, jeudi passé, on est revenu à Laval puisqu'on n'a plus de pied à Montréal, à notre grand malheur. Encore quelques sous dans nos poches jusqu'au prochain départ, il faudra qu'on survivre deux mois ici, question de passer Noël en famille. On devrait repartir mi-janvier, pour de vrai cette fois... enfin, j'espère bien. D'ici là, il n'y aura pas grand ajout sur le blog, mais on reprendra plus régulièrement notre écriture avec la nouvelle année!

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